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jueves, 2 de mayo de 2019

Les suicidés


      
dAlberto Julián Pérez ©

I

Nous habitions dans le pays de la vie.
La poésie était notre refuge.
Nous cherchions la jouissance
mutuelle avec désespoir.
Nous étions cruels et puis avions honte
de nos jeux damants terribles.

Il ne sagissait pas seulement
d’être heureux
mais de risquer et de se perdre
et de jouir intensément dans la chute.
Nous soumettions nos sens
à des situations extrêmes,
et descendions, fiévreux,
dans l’intensité de l’orgasme.

Nous tissions notre guirlande de secrets.
Emportés par l’alcool et l’extase
nous voyagions
vers des paradis imaginaires.

Nous désirions être déjà
dans cet autre monde
pareil à notre poème
ou nous créions des images
exaltées et atroces,
métaphores douloureuses de l’amour.

Nous regrettions notre exil,
nous ressentions de la peur
et même de la terreur.
Nous nous regardions
dans le cristal de nos rêves
pour voir si nous découvrions
le secret de la folie.

Nous allions marcher dans la ville
emmenés par l’anxiété et l’angoisse.
Nous jouions avec l’idée d’une fin.
Nous imaginions
de belles formes du suicide.

Quelle manière de mourir
était la plus pathétique?
Allions-nous choisir le poison,
comme Romeo et Juliette?
Ou une balle dans une chambre d’hôtel
comme Enrique et Delmira Agustini?

Nous connaissions le vertige, la rapidité
qui remue notre temps.
Nous rêvions d'une avalanche damour
et de la libération des sens.
Nous croyions à la mort violente
qui scelle avec du sang
le dernier pacte des amants.

Un jour nous nous sommes arrêtés
au passage à niveau
avec l’idée de nous jeter sous le train.
Nous avons juré
de couronner ainsi notre amour
en offrant les bois de la croix
au fer des clous.

Je me souviens encore du vertige
quand le train est passé
à quelques centimètres de nos corps
et nous nous sommes serrés
tremblants dans les bras
avec lespoir que lautre aurait le courage
de faire le dernier saut, ensemble.

Nous voulions échapper
au vide de lexistence
pour sauver lamour et la jeunesse.
Nous défendions nos symboles :                
le plaisir, le désir de lautre et la poésie.
Nous cherchions l’éternité et le martyr.
Nous refusions de vivre sans héroïsme.

Je me souviens de ce jour
où nous étions nus dans ta chambre
près de la jouissance,
presque suffoqués par l’effort,
quand soudain, terrestre et ridicule,
la porte sest ouverte et ta mère est entrée.
Je me souviens de notre surprise
et de ta déclaration solennelle:
“Nous ne nous marierons pas.”

Comme nous avons ri
plus tard de tout ça,
bien sûr que nous
ne pouvions pas nous marier.

Nous voulions descendre la nuit
dans les tunnels souterrains
de Buenos Aires
et découvrir le plus monstrueux,
le plus abject.

Nous voulions tuer la médiocrité
qui détruit le sacré, qui hait dieu. 

Nous voulions nous promener
dans les égouts de l’éternité
et voir déchus nos frères, les anges.
Nous savions que le haut et le bas
se joignent dans le cœur des amants.

Il n’y a pas damour ni de poésie sans rituel.
Il faut allumer les autels du sacrifice.

Comment séparer l’amour,
du mal et de la mort ?
Comment renoncer à l’égoïsme,
qui sauve tout
et sans lequel la vie n’est pas possible ?

Perdus dans notre labyrinthe
nous essayions de lacérer
l’espace qui nous encerclait
et de louvrir avec notre sexe.
Nous cherchions à soumettre la ville,
la posséder, la dégrader,
la corrompre et laimer.
Nous voulions un amour beau et terrible
qui nous ressemble.
Nous n’acceptions
ni falsifications ni copies.

Comment pouvions nous nous marier
et abandonner notre révolte,
notre amour pour la révolution universelle ?
Nous cherchions à consacrer le monde,
et pas le reproduire. Nous cherchions
à être les seuls et les derniers,
et ne laisser dans le temps
personne qui nous ressemble.

Nous voulions être immortels
et briser le cycle de la vie et la mort.

Nous voulions que notre poème
soit le dernier
avant que la vie n’éclate dans l’éternité
et que nous nous incorporions au soleil
ou aux étoiles de la nuit.

Nous voulions imposer notre loi
et tous les défier.
Nous nous moquions de la société
consommatrice et vulgaire qui nous encerclait.
Nous la jugions avec mépris
parce que nous nous croyions hors de ça.
Nous voulions nous élever à l’instant
le plus sublime de la poésie
et nous confondre
avec les symboles de la totalité désirée.

Nous étions les rebelles, les amants,
et n’avions peur de rien.

Ça a été le moment le plus proche
de l’immortalité que nous avons connu.
Je me souviens dune nuit
nous nous sommes piqués
avec de l’acide
et nous avons prié
notre folie d’amour aux étoiles.
Je me souviens de ton rêve,
où tu chevauchais dans un fleuve
qui descendait dans l’abime,
t’emportait au plus sacré de l’orgasme
et te jetait dans une pluie d’étoiles
au petit matin.

Nous rêvions d’être morts
et contempler l’univers
depuis le paradis
immortel des amants.

Nous voulions que la vie
se confonde avec notre jouissance
et être cruels comme elle est cruelle.
Nous écoutions les moqueries
et la condamnation des autres
et ça nous plaisait. Ils nous blessaient
avec leur méchanceté.
Qui pouvait nous comprendre ?
Qui pouvait sauter
dans l’abime de la poésie?

Secrètement nous savions
que nous marchions sans défense
dans un labyrinthe
duquel nous ne pouvions pas échapper.
Seuls les illusions des métaphores
et les symboles
qui transcendent les limites du corps
pouvaient nous donner
une sensation d’éternité.

II

Le temps mortel est passé
et de tous ces sublimes moments d'amour
seuls les souvenirs sont restés.
Ce qui a disparu est la réalité de la vie,
le corps, la solidité de la langue.

Alors je garde ce manque,
cette grande absence
qui grandit de jour en jour
et c'est l'absence d'amour
et labsence de poésie.

Je sens que les images ne transportent plus
et nous ne pouvons pas, comme avant,
trouver de nouvelles sensations
dans cette merveilleuse chute
dans lequel notre amour nous plongeait.

Si un jour, par hasard, nous nous retrouvions,
combien il serait difficile de mettre en mots
la prose de nos vies,
quelle poésie différente nous écririons
face à la réalité des choses.

Comme l’évidence nous frapperait au visage.
Que pourrions-nous dire de ces gestes, de ce parfum,
comment pourrions-nous courtiser la fin.

sont passés l'au-delà et l'éternité.
L'idée de Dieu et l'image de lamour
sont devenus si différentes pour nous.

Il n'y a personne pour nous sauver.
Nous sommes tombés indéfiniment
et nous avons perdu
ce que nous aimions le plus dans la vie.

Ce grand poème
c'était un poème d'amour
écrit dans le paradis des amants.

Rien que nous pourrions sauver
au-delà de la mémoire et des mots.
N’ayant pas su mourir à temps
nous sommes condamnés à mourir seuls.

Nous n'avons pas compris l'immortalité.
Comme nous étions près d'être des dieux.

Comme notre poème n’était pas loin
dêtre la somme et la fin de la poésie.

Je ne sais pas si ce que nous recherchions
avec notre sacrifice
était de sauver l'amour ou sauver la poésie.
Dans notre mémoire, ils sont inséparables.


III 


Oh mon Dieu, permettez,
au moins comme un jeu,
que notre histoire se répète !
Permettez que la littérature
habille de sang
l'espace bleu de nos espoirs !
Faites un miracle.
Redonnez-nous l'occasion
de mourir d'amour
et vivre à jamais !
Laissez-nous visiter le paradis
où les amoureux
rêvent la poésie et l'amour ensemble.
La nôtre était une poésie de la vie.

Ecoute, mon amie,
si Dieu y consentait,
dans notre morne vieillesse
nous nous retrouverions un jour,
et serions de nouveau
jeunes et amoureux !
Nous retrouverions l’extase
ressentie quand nous étions ensemble !
Tu te rappelles ? L'amour peut,
comme la métaphore,
associer des êtres
dans une nouvelle unité.

Nous savons que la vie
est prête à tout emporter
et l'amour à nous donner
la vie éternelle.
Dans notre existence condamnée
on tourne la page du livre.

Comme dans les histoires
merveilleuses
le temps s'est arrêté.
Notre aventure se répète.
Les lumières de lart la renouvellent. 
Nous attendons encore,
comme cette fois,
à côté de la barrière, le train de la mort.

Nous rêvons qu'il arrive
avec la force d'un torrent.
Nous sentons que cela
va unir notre matière au divin.
Sa fureur sublime nous arrache du sol
et nous propulse dans le vide.
Enlacés, nous nous élevons
dans lespace sidéral.

Le train doré se lève, comme un symbole,
avec nous, vers le soleil.
La machine brillante vole vertigineusement.
Nous nous regardons
dans le miroir des choses magiques
qui sont autour de nous
et nous transmettent leur beauté.
Nous nous savons jeunes pour toujours.

Le train arrive
au paradis des amants suicidaires.
Ceux qui ont cherché, avant nous,
dans la mort, l'éternité de l'amour,
nous attendent.


Leurs beaux corps, suspendus,
entre les nuages, flottent,
délicates sculptures de formes pleines.
Comme dans les images sacrées,
nous voyons,
dans la partie supérieure de la scène,
Dieu entouré d'anges.

Nous nous allongeons
dans la prairie de nuages
à côté des autres amoureux
et nous tendons nos mains vers Dieu
jusqu’à toucher, sensuels,
du bout des doigts les anges.

Un rayon de lumière divine nous traverse.

Nous avons gagné notre place au paradis.
Nous demeurons enlacés
sous le regard rédempteur de Dieu le père.

Des nuages aux formes capricieuses
nous survolent, célestes et roses.
Les chérubins y sont perchés
et nous lancent leurs flèches magiques.
Flotte devant nous, comme un petit bateau,
l'urne en ivoire de notre alliance.
Rien ne peut nous séparer.

Dans notre rêve rédempteur
Dieu nous a pardonné.
Il a sauvé notre amour
et nous ne devrons jamais
faire face à la vieillesse,
à la douleur et à la mort.

Baignés d'éternité, dans l'espace
nous marchons, jeunes d'amour,
anges pour toujours.

Imaginez que, comme
dans une histoire merveilleuse,
ceci est vraiment arrivé
et nous sommes ses personnages.

Ayez de la compassion, Seigneur,
pour ces amants repentis
d'avoir vécu une longue vie séparés.

La nostalgie du péché
a tourmenté mon âme.
Il aurait été préférable
de mourir ensemble.
L'éternité était à notre porte.

Le paradis est un terrain fertile pour ceux
qui meurent d'amour
et apportent leur petit poème à Dieu.
Laurier que le pigeon
ne pouvait pas porter dans son bec
et qu’ils transportent
dans leur esprit transparent.

Saint, saint, est le Seigneur,
roi des cieux et de la terre,
puisse son nom
être loué pour toujours.

Épilogue

Cher lecteur,
notre voyage est terminé.
Pèlerins nous sommes
d'un monde transitoire.

Dis-moi, s’il te plait,
nous garderas-tu en mémoire?
Embrasse et protège nos ombres.
Nous restons avec toi
ensemble dans lamour
et dans l'horreur de la littérature.

                                    Traduction de Charlotte Coing, avec lauteur



                  Los suicidas

                                    de Alberto Julián Pérez

I

Estábamos en el país de la vida.
La poesía era nuestro refugio.
Perseguíamos el mutuo goce con desesperación.
Éramos crueles y después nos avergonzábamos
de nuestros juegos de amantes terribles.

No se trataba tan solo de ser felices
sino de arriesgar y perdernos
y gozar intensamente en la caída.

Buscábamos sensaciones extremas
y descendíamos, afiebrados,
a la intensidad del orgasmo.

Tejíamos nuestra guirnalda de secretos.
Llevados por el alcohol y el éxtasis
viajábamos a paraísos imaginarios.

Deseábamos estar ya en ese otro mundo
parecido a aquel poema nuestro
en que creábamos imágenes exaltadas y atroces,
metáforas dolorosas del amor.

Lamentábamos nuestro exilio
y sentíamos miedo y aún terror.
Nos mirábamos en el cristal de nuestros sueños
a ver si descubríamos el secreto de la locura.

Salíamos a caminar por la ciudad
llevados por la ansiedad y la angustia.
Jugábamos con la idea del fin.
Imaginábamos bellas formas del suicidio.

¿Qué tipo de muerte era más patética?
¿Quizás el veneno, como Romeo y Julieta?
¿O un balazo en un cuarto de hotel
como Enrique y Delmira Agustini?

Sabíamos del vértigo, la velocidad,
que mueve a nuestro tiempo.
Soñábamos con una avalancha de amor
y la liberación de los sentidos.
Creíamos en la muerte violenta
que sella con sangre
el pacto final de los amantes.

Un día nos detuvimos en la barrera del tren
con la idea de arrojarnos.
Juramos así coronar nuestro amor
ofreciendo los maderos de la cruz
al hierro de los clavos.

Aún recuerdo el vértigo
cuando pasó el tren
a centímetros de nuestros cuerpos
y nos abrazamos palpitantes
creyendo que quizá el otro se animara
a dar el salto final, unidos.

Queríamos escapar del vacío de la existencia
para salvar el amor y la juventud.
Defendíamos nuestros símbolos:
el placer, el deseo del otro y la poesía.
Buscábamos la eternidad y el martirio.
No aceptábamos vivir sin heroísmo.

Recuerdo aquel día en que estábamos desnudos en tu cuarto
cerca del goce, casi sofocados por el esfuerzo,
cuando de pronto, terrenal y ridícula, se abrió la puerta y entró tu madre.
Recuerdo nuestra sorpresa y tu declaración solemne:
“No vamos a casarnos”.

Cómo nos reímos de eso luego,
y claro que no podíamos casarnos.

Queríamos descender por la noche
a los túneles subterráneos de Buenos Aires
y descubrir lo más monstruoso, lo más abyecto.

Queríamos matar la mediocridad
que destruye lo sagrado, que odia a dios.

Queríamos pasearnos por las cloacas de la eternidad
y ver caídos a nuestros hermanos, los ángeles.
Sabíamos que lo más elevado y lo más bajo
se unen en el corazón de los amantes.

No hay amor ni poesía sin ritual.
Había que encender los altares del sacrificio.

¿Cómo separar al amor, del mal y de la muerte?
¿Cómo renunciar al egoísmo, que todo lo salva,
y sin el cual la vida no es posible?

Perdidos en nuestro laberinto
tratábamos de lacerar el espacio que nos circundaba
y abrirlo con nuestro sexo.
Buscábamos someter la ciudad, poseerla,
degradarla, corromperla y amarla.
Queríamos un amor bello y terrible
que se pareciera a nosotros.
No aceptábamos falsificaciones ni substitutos.

¿Cómo podíamos casarnos
y abandonar nuestra rebeldía,
nuestro amor a la revolución universal?
Buscábamos consagrar el mundo,
no reproducirlo. Buscábamos ser los únicos y los últimos
y no dejar en el tiempo a nadie que se nos pareciera.

Queríamos ser inmortales
y cortar el ciclo de la vida y de la muerte.

Queríamos que nuestro poema
fuera el último
antes que la vida estallara en la eternidad
y nos integráramos al sol
o a las estrellas de la noche.

Queríamos imponer nuestra ley
y desafiar a todos.
Nos burlábamos de la sociedad adquisitiva y vulgar
que nos rodeaba. La juzgábamos con desprecio
porque nos creíamos más allá de todo eso.
Queríamos elevarnos al momento más sublime de la poesía
y confundirnos con los símbolos de la totalidad deseada.

Éramos los rebeldes, los amantes,
a nada le temíamos.

Ese fue el momento más cercano a la inmortalidad
que conocimos.
Recuerdo una noche en que nos inyectamos ácido
y rezamos nuestra locura de amor a las estrellas.
Recuerdo aquel sueño tuyo, en que cabalgabas en un río
que descendía al abismo,
te llevaba a lo más sagrado del orgasmo
y te lanzaba en una lluvia de estrellas
a la mañana.

Soñábamos con estar muertos
y contemplar el universo
desde el paraíso inmortal de los amantes.

Queríamos asimilar la vida a nuestro goce
y ser crueles como ella es cruel.
Sentíamos la burla y la condena de los otros
y eso nos gustaba. Nos lastimaban
con su mezquindad. ¿Quién podía comprendernos?
¿Quién podía saltar al abismo de la poesía?

Secretamente sabíamos, sin embargo,
que errábamos indefensos por un laberinto
del que no podíamos escapar.
Sólo la ilusión de las metáforas
y los símbolos que trascienden los límites del cuerpo
podían darnos una sensación de eternidad.


II

El tiempo, mortal, ha pasado
y de todos aquellos momentos sublimes del amor
solo han quedado los recuerdos.
Lo que se ha ido es la realidad de la vida,
el cuerpo, la solidez del lenguaje.

Así guardo esta carencia,
esta gran ausencia que crece día a día
y es ausencia de amor
y ausencia de poesía.

Siento que las imágenes ya no transportan
y no podemos, como antes,
buscar sensaciones nuevas
en aquella caída maravillosa
en que nos hundía nuestro amor.

Si un día, por azar, nos encontráramos
qué difícil sería poner en palabras
la prosa de nuestras vidas,
qué poesía distinta escribiríamos
ante la crudeza de las cosas.

Cómo nos golpearía la realidad el rostro.
Qué podríamos decir de aquellos gestos, de aquél perfume,
cómo podríamos cortejar el fin.

Dónde han quedado el más allá y la eternidad.
Qué distinta se nos presenta ahora la idea de dios
y la imagen del amor.

Ya no hay quien nos salve.
Hemos caído indefinidamente y hemos perdido
lo que más amábamos en la vida.

Aquél gran poema
fue poema de amor
y quedó escrito en el paraíso de los amantes.

Nada pudimos guardar
más allá del recuerdo y las palabras.
Quizá porque no supimos morir a tiempo
estamos condenados a morir solos.

No entendimos la inmortalidad.
Qué poco faltaba para ser dioses.

Qué cerca estaba nuestro poema
de ser la suma y el fin de la poesía.

No sé si lo que buscábamos con nuestro sacrificio
era salvar el amor o salvar la poesía.
En nuestro recuerdo son inseparables.

III  

¡Ay dios mío, deja que, al menos como un juego,
se repita nuestra historia!
¡Permite que la literatura
vista de sangre
el espacio azul de nuestras esperanzas!
Haz el milagro. ¡Danos otra vez la oportunidad
de morir de amor y vivir para siempre!
Déjanos visitar el paraíso donde los amantes
sueñan unidos la poesía y el amor.
La nuestra era poesía de vida.

¡Mira, amiga, si dios lo consintiera,
y en nuestra desolada madurez
nos encontráramos un día,
y volviéramos a ser jóvenes y a amarnos!
¡Experimentaríamos otra vez el éxtasis
que sentimos cuando estábamos juntos!
¿Te acuerdas? El amor puede, como la metáfora,
asociar a los seres en una unidad nueva.

Sabemos que la vida está dispuesta a quitarnos todo
y el amor a darnos la vida para siempre.
En nuestra existencia condenada
damos vuelta la página del libro.

Como en los relatos maravillosos
Se ha detenido el tiempo.
Nuestra aventura se repite.
La renuevan las luces del arte.
Volvemos a esperar, como aquella vez,
junto a la barrera, el tren de la muerte.

Soñamos que llega con la fuerza de un torrente.
Sentimos  que va a unir nuestra materia a lo divino.
Su furia sublime nos arranca del suelo e impulsa hacia el vacío.
Abrazados, nos elevamos al espacio sideral.

El tren de oro sube, como un símbolo, con nosotros, hacia el sol.
Vuela vertiginosa la máquina refulgente.
Nos observamos en el espejo de las cosas mágicas
que están a nuestro alrededor
y nos transmiten su hermosura.
Nos sabemos por siempre jóvenes.

El tren llega al paraíso de los amantes suicidas.
Nos aguardan aquellos que buscaron, antes que nosotros,
en la muerte, la eternidad del amor.

Sus cuerpos bellos, expectantes,
entre las nubes flotan,
esculturas delicadas de formas llenas.
Como en los cuadros sagrados, vemos,
en la parte superior de la escena,
a Dios rodeado de ángeles.

Nos reclinamos en el prado de nubes
junto a los otros amantes
y extendemos nuestras manos hacia Dios
hasta tocar, sensuales,
con las yemas de nuestros dedos
los dedos de las manos de sus ángeles.

Un rayo de luz divina nos atraviesa.

Hemos ganado nuestro lugar en el paraíso.
Permanecemos abrazados
bajo la mirada redentora del Dios padre.

Vuelan sobre nosotros nubecitas de formas caprichosas,
celestes y rosas. Desde ellas, los Amores
nos lanzan sus dardos mágicos. Flota
delante nuestro, como una pequeña nave,
la urna de marfil de nuestra alianza.
Nada podrá separarnos.

En nuestro sueño redentor
Dios nos ha perdonado. Ha salvado nuestro amor
y ya nunca tendremos
que enfrentar la vejez, el dolor y la muerte.

Bañados de eternidad, en el espacio andamos,
jóvenes de amor, por siempre ángeles.

Imaginemos que, como en los cuentos maravillosos,
esto verdaderamente ha pasado y somos sus personajes.

Ten compasión, Señor, de estos amantes arrepentidos
de haber vivido una larga vida separados.

La nostalgia del pecado martirizaba mi alma.
Mejor hubiera sido morir juntos.
La eternidad estaba a nuestro alcance.

El paraíso es tierra fértil para aquellos
que mueren por amor y llevan a Dios su pequeño poema.
Laurel que la paloma no pudo cargar en su pico
y ellos transportan en su espíritu transparente.

Santo, santo, es el señor, rey del cielo y de la tierra,
que su nombre sea loado para siempre.

Epílogo

Lector amigo, ha concluido nuestro viaje.
Peregrinos somos de un mundo transitorio.
Di, por favor, ¿nos guardarás en tu memoria?
Abraza y protege nuestras sombras.
Contigo estamos, en el amor unidos,
y en el horror de la literatura.





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